« J’ai travaillé pendant dix ans à la tête d’une imprimerie traditionnelle. Elle fonctionnait comme le font tous les autres modèles économiques du secteur, dans une logique industrielle » se souvient Julien Da Costa. Le dirigeant de Flex’ink, une imprimerie d’un genre nouveau, entend par là : produire en grande quantité, vite, et pour pas cher. « Pour rester compétitif et garder le rythme, je renouvelais régulièrement mes machines que j’achetais à près d’un million d’euros. À cette époque, j’étais dans la logique : plus je vends, plus j’amortis mes investissements, plus je gagne de l’argent » poursuit-il.
Or, ce modèle économique a très vite montré ses limites et Julien Da Costa a dû licencier ses salariés. « Au fur et à mesure, avec l’arrivée de concurrents extérieurs et d’internet, pour rester au sommet des ventes, nous avons dû nous mettre à produire beaucoup, mais avec moins de moyens. Au départ, je limitais l’entretien et le nettoyage, puis petit à petit, il a fallu tirer sur la corde humaine. Les salariés se sont mis à travailler plus, pour moins cher, jusqu’à la rupture » se désole, Julien Da Costa.
Créer un nouveau modèle économique pour l’imprimerie
Après cette expérience, le dirigeant pense d’abord à abandonner le métier. Mais après un temps de réflexion, Julien Da Costa décide d’inventer un modèle économique pour l’imprimerie, à partir des leçons qu’il a tirées de son passé. « J’ai des salariés, j’ai le savoir-faire, il faut juste trouver comment sortir de cette logique volumique, qui, en plus de ne pas être viable est un désastre écologique ».
Pour commencer, le dirigeant décide d’aller voir chez ses clients. « Je suis allé frapper à leurs portes pour voir comment les documents que j’imprimais finissaient. La plupart du temps, la moitié des papiers avaient été distribués et le reste traînait dans un placard ou dans une poubelle…Et là, je me suis dit : il faut que je trouve le moyen pour que mes clients impriment en quantité raisonnable pour éviter ce gâchis, mais que ce soit viable pour mon imprimerie. » De là, est née Flex’ink, basée à Alincthun, dans le Pas-de-Calais. « Je suis arrivé à dire que mon métier finalement ce n’est pas tant d’imprimer, mais de mettre à la disposition de mes clients des documents qui soient imprimables. »
Un abonnement mensuel pour les clients
Dans un premier temps, le dirigeant de Flex’ink part sur le modèle suivant : « Je vais prendre l’exemple d’un auteur, qui doit imprimer une certaine quantité d’exemplaires. Avec le modèle traditionnel, il aurait imprimé 1 000 livres pour 10 000 euros et s’il n’en vend que 300, il perd environ 7 000 euros. Avec le modèle que j’avais créé à la base, ce même auteur aurait prévu un stock de 1 000 crédits d’impressions, mais nous n’en aurions imprimé que 300 pour commencer. Pour les 700 qui restent, si l’auteur les vend tant mieux, sinon je m’engage à lui rembourser la moitié de son crédit d’impression et là le résultat opérationnel pour lui comme pour moi est de + 3 500 euros. »
Cette solution, idéale sur le papier, a eu du mal à se vendre. Julien Da Costa a très vite compris qu’elle n’était pas adaptée aux besoins et habitudes de ses clients. Aujourd’hui, l’imprimerie Flex’ink est basée sur un autre modèle économique, qu’est l’abonnement. « Je propose désormais d’imprimer les documents sans engagement de quantité, à prix fixe, en échange d’une mensualité. Cela permet aux clients de tester un fonctionnement en amélioration continue sans bouleversements de leurs habitudes et de leurs repères. » précise le dirigeant. Flex’ink est aujourd’hui une belle preuve d’économie de la fonctionnalité.
Lolita Péron